Parce que confinement, parce qu’envie d’évasion, mais surtout, parce que j’ai un immense plaisir à travailler quotidiennement cette terre sonore, je me suis remis dans les enregistrements faits à Makronissos.
Dans notre projet, il n’est question que de raconter cette rencontre avec l’île.
Et mes interrogations initiales étaient :
« Dans ces lieux vierges de toute activité récente, les sons du passé sont-ils encore audibles ? »
« A Makronissos, le souffle du vent porte-t-il encore les mots des poètes ? »
Aujourd’hui ma réponse est définitivement oui.
Je vous partage ma dernière création.
Prenez soin les uns des autres, comme cet arbre l’a toujours fait.




A PRESENT l’arbre te regarde droit dans les yeux au travers de sa feuillée
la racine te montre tout son parcours
toi tu regardes le monde droit dans les yeux- tu n’as rien à cacher.
Tes mains sont propres et lavées avec le gros savon du soleil
tes mains franches tu les poses sur la table amie
tu les remets entre les mains de tes camarades.
Les gestes de tes mains sont simples et si précis.
Et quand encore tu retires un poil de la veste de ton ami
c’est comme si tu retires une feuille au calendrier
en accélérant le rythme du monde.
Même si tu sais qu’il faudra encore beaucoup pleurer
avant d’apprendre au monde à rire.
YANNIS RITSOS février 1949
extrait du: Chaudron Calciné
Traduit du grec par Anne Personnaz, dont les mots de l’Introduction ont trouvé en moi une incroyable résonance:
Yannis Ritsos a vécu à recueillir les vibrations de la lumière. Il nous a donné « l’expérience exquise de l’inexplicable. ». Amant de l’infini, il scrute inlassablement la sensation la plus ténue née de sa familiarité avec la nature, dans le silence et la solitude. Témoignant de la beauté du monde dans laquelle il puise la grâce de s’émerveiller.
Un chemin pour nous en ces temps où nous avons le sentiments que nos libertés se réduisent: il y a une urgence à écouter la vie, à célébrer la beauté du monde.
Merci à Thibaut V. de m’avoir offert cet incroyable recueil de poèmes.

Et puisque vous êtes venu jusqu’ici, voici mon cadeau du week-end.
C’est le premier son que j’ai travaillé en arrivant sur l’île.
Pour une rencontre ce fut une sacrée rencontre.
